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Musée Yves Saint Laurent Marrakech : Studio KO, architecture et mémoire du couturier


Le Jeudi 11 Décembre modifié le Mardi 30 Novembre



À proximité du Jardin Majorelle, le Musée Yves Saint Laurent Marrakech (mYSLm) articule une vision architecturale qui relie la pensée de Yves Saint Laurent, le paysage marocain et la culture berbère. Conçu par Studio KO, l’édifice traduit un geste couture en matière, lumière et forme, avec des briques de terre cuite façonnées à la main dont la texture rappelle la trame et l’ordit des tissus. « Marrakech m’a appris la couleur », déclarait Yves Saint Laurent, une affirmation qui éclaire la palette, les courbes et la lumière mesurée du projet.



La genèse du musée est indissociable de Pierre Bergé, compagnon et associé du couturier pendant plus de cinquante ans, qui a voulu préserver non seulement les vêtements, mais la méthode, la vision et le lien profond de Saint Laurent avec le Maroc. Après le décès du créateur en 2008, Bergé a suivi le projet de bout en bout — du site aux contenus — jusqu’à l’ouverture en 2017, s’éteignant un mois avant l’inauguration. Le choix de Studio KO ne doit rien au hasard : il résulte de visites de leurs réalisations marocaines et de leur capacité à travailler des matériaux locaux pour produire des architectures contemporaines ancrées dans le contexte culturel et paysager.

Marrakech, découverte par Saint Laurent en 1966, devint refuge et laboratoire. Les couleurs saturées, les géométries de l’art islamique, les odeurs et les rythmes de la médina ont nourri son œuvre ; avec Bergé, il a acquis et restauré le Jardin Majorelle, en faisant un lieu de contemplation et d’étude dont le musée prolonge l’héritage. L’implantation géométrique compacte et les courbes adoucies de l’édifice dialoguent avec l’architecture vernaculaire et la lumière de Marrakech ; la maçonnerie poreuse et la stratification des volumes répondent aux exigences thermiques et au climat local.

Le bâtiment se perçoit comme un volume dense, ponctué de surfaces vibrantes et de bords irréguliers qui évoquent le bouclé cher au couturier. Les façades en brique, posées selon des trames changeantes, construisent une lecture tactile de la matière ; l’ensemble s’organise autour d’un vestibule circulaire, à la manière d’un patron dont chaque pièce a une fonction précise et une qualité formelle. Olivier Marty et Karl Fournier ont conçu une architecture « tissée », où les lignes et les rythmes rejoignent la couture sans en copier les codes.

À l’intérieur, un parcours de silences, d’ombres et de lumières chaudes mène à une salle permanente d’environ 400 m² présentant une sélection d’une cinquantaine de pièces emblématiques, exposées dans une pénombre étudiée pour exalter formes et couleurs. Les créations sont traitées comme des œuvres et comme des traces d’un raisonnement, dans une scénographie qui privilégie la lecture des volumes. Une salle d’expositions temporaires accueille photographie et art contemporain ; un théâtre-auditorium de 130 places ouvre aux projections, conférences et performances, afin de maintenir un dialogue actif entre arts visuels, parole et mode.

La vocation de recherche est affirmée par une bibliothèque de plus de 5 000 volumes dédiée à la mode, à la culture berbère et à la botanique marocaine, complétée par un bookshop et un café-restaurant avec terrasse donnant sur un jardin. L’expérience est cohérente : architecture, matériaux, lumière et mémoire se répondent pour construire un récit physique du monde esthétique de Saint Laurent, où rigueur minimale et sensualité tactile se rencontrent, et où la modernité se conjugue à la tradition.

Le musée évite l’effet spectaculaire au profit d’une présence intime et méditative. Les courbes, la lumière contrôlée et les matières brutes mais élégantes inscrivent l’édifice dans Marrakech tout en révélant la pensée du couturier. Il s’agit d’un projet couture à l’échelle de la ville, où la forme raconte déjà l’intention et où l’architecture devient mémoire.

Source




Source : https://lemarrakech.articlophile.com/lebulletin/i/...