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Rosalía, LUX: Marrakech, soufisme et une pop en mouvement


Le Jeudi 13 Novembre modifié le Mardi 30 Novembre




Rosalía achève une tétralogie amorcée par Los Ángeles puis El Mal Querer et Motomami avec LUX, sorti le 7 novembre 2025. Le disque s’ouvre sur une ligne qui fixe son horizon spirituel — “la pureté est en moi / et elle est à Marrakech” — et inscrit la Ville Ocre au cœur d’une autobiographie musicale où “les villes racontent les étapes et les bouts d’elle-même, les plumes laissées dans les batailles”. L’hommage se prolonge dans la mention des femmes de Jamaa el Fna, liseuses de mains et maîtresses du henné, que l’on entend à l’orée de La Yugular.


La Yugular pose une image tirée du Coran: en sourate Qaf (50:16), “Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire”. Rosalía y insère un vers associé à la grande mystique soufie Rabi’a al-Adawiyya: “Pour lui je détruirais ciel et enfer, sans avoir à promettre ou menacer.” La diction arabe, portée dans sa tessiture la plus aiguë, se fond dans un tissage original où la soleá et les procédés du flamenco servent de matrice sans recourir au pastiche orientaliste. La recherche va “dans la langue arabe et l’islam, des symboles pour son propos”, sans renier les circulations entre reggaeton, Vivaldi, Camarón de la Isla ou les Carmina Burana. Le geste demeure discret quand il effleure la Palestine: “parler d’occupation avec pudeur”.


La réception critique s’enflamme autour de Berghain, pièce pivot devenue court métrage, et de son imaginaire détourné où le conte s’ouvre au cauchemar: “un univers de Blanche-Neige qui tourne au cauchemar des plus féministes.” Dans LUX, les veines pop récentes affleurent. Les slows — Sauvignan Blanc, Magnolias — dialoguent avec Céline Dion, Mariah Carey et le groupe espagnol Mecano, tandis que des échos de Kanye West “semblent avoir puisé dans le son d’église”. L’ensemble sonne comme une église postmoderne, œcuménique, en proximité avec les courants évangéliques qui traversent des communautés gitanes ou romaní en Espagne; Rosalía emploie d’ailleurs le nom caló de Dieu, “Undebel” (La Yugular), au milieu d’une lignée de grandes voix espagnoles trop souvent reléguées — Isabel Pantoja, Rocío Jurado.


Motomami fut un apprentissage intensif des textures industrielles techno américaines et latines, éprouvées depuis des décennies dans les studios de l’Empire/Amérique. Elle a fait, comme on dit en espagnol, l’Amérique (hacer las Américas), et revient avec “une fortune de sons, de contacts dans l’industrie de la production, de la musique pro, des tops dans leurs domaines.” La tension demeure américaine dans son paradoxe: “c’est à la fois la religion et la révolution.”




Source: Rosalía | Spiritualité(s) et révolution | terss.net

Juan Palao (Madrid |Philologue, poète et traducteur galicien.
Il vit et travaille à Marrakech (au Maroc)





Source : https://lemarrakech.articlophile.com/lebulletin/i/...